Je mange mes émotions, quoi faire ?

11 octobre 2023

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Je n’arrive pas à me contrôler. Je manque tellement de volonté. Je sais ce que je devrais faire pourtant, je ne le fais pas. Je mange mes émotions, je sais que je devrais arrêter. Le jour, ça va bien. Je suis en contrôle, mais le soir… c’est après le travail que ça se gâte. Puis, j’arrive à un point où j’ai l’impression d’avoir tout gâché. Je me laisse aller. J’ai honte. Puis je me promets que demain sera une meilleure journée.

Ça, ce sont les mots de mes clients qui résonnent dans mes pensées au moment où j’écris ces lignes. On a souvent l’impression qu’on est seul dans ce tourbillon, et que notre self control est toujours à blâmer quand ça va mal, mais non. Et si je te disais que c’est normal, ce que tu vis et que ce n’est pas un manque de volonté ? Et si je te disais que la nourriture peut être une source de réconfort et que ce n’est pas nécessairement malsain ?

Illustration © Elaillce – Alice Hosdain

Manger ses émotions, ça veut dire quoi ?

Manger ses émotions se définit comme l’utilisation de la nourriture dans le but d’apaiser ou d’anesthésier une émotion en l’absence de faim physique. Or, manger est un besoin qu’on ne peut dissocier de nos émotions. Cela contribue aussi au plaisir de manger de plusieurs façons. Quand on parle de réconfort, encore là, on peut faire référence à plusieurs choses. Certains aliments ou repas seront plus réconfortants que d’autres selon la saison. On peut aussi penser au réconfort de manger quelque chose qu’on aime, qui nous fait plaisir tout simplement. Les plats d’automne mijotés, particulièrement ceux qui font appel à des souvenirs positifs de notre enfance ou encore les biscuits qui permettent de combler notre envie de sucré après le repas en sont des exemples.

Quand ça devient problématique

Cela dit, ça ne veut pas dire que tu dois rester indifférent face à tes comportements si tu n’es pas bien là-dedans. Quand la nourriture demeure ton seul moyen d’apaiser tes émotions, ou même de les anesthésier, ça vaut la peine de travailler sur la gestion de ses émotions et la relation qu’on entretient avec la nourriture. Quand tu as l’impression de perdre le contrôle de ton alimentation ou que tu consommes de grandes quantités de nourritures en peu de temps, ce que tu vis se rapproche peut-être davantage d’un trouble alimentaire. Quand tes comportements te dérangent au point de nuire à ton bien-être psychologique, ne reste pas seul là-dedans.

Illustration © Elaillce – Alice Hosdain

Plus tu contrôles, pire ça sera…

Le vrai problème derrière le comportement de manger ses émotions, c’est souvent ce qu’on tente de faire avec. Si le lien fort entre tes émotions et ton alimentation te dérange et que tu as tenté de changer ton comportement en essayant de mieux te « contrôler », tu n’es pas la seule personne à y avoir pensé. La vérité c’est que plus tu contrôleras tes envies de manger, pire ça sera.

Pourquoi ?

Parce que cela a comme effet d’augmenter le sentiment de restriction cognitive, c’est-à-dire l’intention de contrôle. On peut tenter de contrôler notre alimentation en limitant les quantités, la fréquence à laquelle on mange certains aliments ou encore carrément en s’interdisant de manger certaines choses. Plus cette intention de contrôle est importante ou prolongée, plus tu risques de perdre le contrôle. La tentation de faire ce que tu ne devrais pas est simplement trop grande. C’est plus fort que toi. Imagine un ballon que tu maintiens sous l’eau, il tente inévitablement de remonter à la surface.

La restriction cognitive augmente non seulement le risque de perdre le contrôle, mais peut aussi augmenter le comportement de manger en réponse à ses émotions. En effet, le moindre besoin de réconfort ou même de célébrer quelque chose devient un prétexte pour se récompenser. C’est comme si tu devais saisir ces opportunités avant qu’elles ne passent. La vérité, c’est que tu n’as pas besoin de raison pour manger les douceurs dont tu as envie. Et quand tu te permets de manger en fonction de tes envies, inconditionnellement, le comportement de manger ses émotions devient aussi beaucoup moins présent.

Je mange mes émotions, quoi faire ?

Si le contrôle n’est pas la solution, qu’est-ce qu’on fait alors ? La réponse n’est pas universelle et il se peut que tu aies besoin d’être accompagné pour trouver la bonne solution pour toi. Outre le fait de travailler à apprivoiser ses émotions et développer différentes stratégies pour les gérer sainement, j’aime travailler avec mes clients à « se permettre » de manger ses émotions, du moins plus consciemment. Ça semble surprenant au départ, mais comme je te le disais plutôt, le vrai problème, c’est l’intention de contrôle, la restriction et la culpabilité qui vient avec.

Si on mange pour se réconforter, encore faut-il aller chercher ce réconfort dans ce qu’on mange justement. Lorsqu’on mange en cachette, en travaillant, ou vite fait, à même l’emballage encore debout devant l’armoire, la satisfaction qu’on en retire est de très courte durée, quasi inexistante. Ce n’est que quelques secondes après que le besoin de manger se fera sentir à nouveau. Tu l’as probablement déjà expérimenté, maintenant tu comprends un peu mieux pourquoi. Lorsque tu prends le temps de savourer tes aliments et que tu te le permets, tu vas chercher une satisfaction plus grande et ton besoin est comblé. C’est du réconfort efficace.

Pour y arriver, tu pourrais essayer différentes stratégies :

  • Mettre les aliments dans de la vaisselle.
  • Prendre le temps de savourer ton biscuit, qu’est-ce que tu aimes tant dans son goût, sa texture ?
  • Te permettre de les manger même en présence d’autres personnes à la maison.
  • Te permettre de le manger dans d’autres contextes (sans justifier que tu le mérites ou non).

En terminant, je te rappelle que manger, oui nous apporte du réconfort, mais temporairement. Lorsqu’on travaille ce comportement, l’objectif n’est pas de combattre ces envies ou de les contrôler, mais de les comprendre sans jugement. En prenant conscience que l’envie de manger découle d’une émotion, on peut identifier ce qui se passe, ce qu’on ressent, quelles sont nos pensées. Parfois, manger nous permet de s’apaiser juste assez pour y arriver. On peut aussi expérimenter d’autres moyens pour varier ses stratégies. C’est un cheminement qui peut être long, et c’est tout à fait correct que ça ne soit pas parfait. L’ingrédient secret, c’est la bienveillance envers soi.

Références

Katterman, S. N., Kleinman, B. M., Hood, M. M., Nackers, L. M., & Corsica, J. A. (2014). Mindfulness meditation as an intervention for binge eating, emotional eating, and weight loss: a systematic review. Eating behaviors, 15(2), 197-204.

Macht, M., & Simons, G. (2011). Emotional eating. In Emotion regulation and well-being (pp. 281-295). Springer, New York, NY.

Van Strien, T., Frijters, J. E., Bergers, G. P., & Defares, P. B. (1986). The Dutch Eating Behaviour Questionnaire (DEBQ) for assessment of restrained, emotional and external eating behaviour. International Journal of Eating Disorders, 5, 295–315


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